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Textes fondamentaux

Testaments et héritage

Ces testaments sont notre héritage. Des racines profondes ne gèleront jamais.

TESTAMENT DE SAINT REMI

 

 

Au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Gloire à Dieu, ainsi soit-il. 

Moi, Rémi, évêque de la cité de Reims, revêtu du sacerdoce, ai fait mon testament, conformément au droit prétorien ; j’ai voulu qu’il ait la force d’un codicille dans le cas où il y manquerait quelque formalité. Quand moi, Rémi, évêque, j’aurai quitté cette vie, je t’institue mon héritière, ô sainte et vénérable Église catholique de la ville de Reims, (…)

[Suit la répartition des biens que possédait Rémi. Au milieu de cette énumération, on trouve ce passage intéressant, car il fait allusion aux miracles accomplis pour le salut des Francs, dont vraisemblablement le miracle de la sainte ampoule ]

A l’égard des villages que mon seigneur d’illustre mémoire, le roi Clovis, que j’ai tenu sur les saints fonts du baptême, m’a donnés en propre, lorsque, païen encore, il ne connaissait pas le vrai Dieu, je les ai consacrés aux lieux les plus pauvres, de peur qu’il ne crût, infidèle qu’il était, que je fusse attaché aux choses de ce monde et moins occupé de son salut que des biens temporels. Il a admiré ma conduite et a consenti avec bonté et générosité, tant avant qu’après son baptême, que j’intercédasse en faveur de tous ceux qui souffraient .

Comme il a reconnu que de tous les évêques de la Gaule, c’est moi qui ai le plus travaillé à la conversion des Francs, Dieu m’a donné tant de crédit auprès de lui et la vertu divine, par la grâce du Saint-Esprit, a fait opérer par moi, pauvre pécheur, tant de miracles pour le salut des Francs, que le roi a non seulement restitué à toutes les Églises du royaume tout ce qu’on leur avait enlevé, mais encore en a enrichi beaucoup d’autres de son bien propre, par un effet gratuit de sa libéralité 3. (…)

Que le présent testament, observé fidèlement et inviolablement par mes frères et successeurs les évêques de Reims, maintenu et défendu partout par mes très chers fils les rois de France par moi consacrés au Seigneur à leur baptême, par un don gratuit de Jésus-Christ et la grâce du Saint-Esprit, obtienne à tout jamais une force inviolable et perpétuelle dans ses dispositions, envers et contre tout (…)

Seulement, par égard pour la famille royale qu’avec tous mes frères et co-évêques de la Germanie, de la Gaule et de la Neustrie, pour l’honneur de la sainte Église et la défense des pauvres, j’ai choisie délibérément pour être élevée à tout jamais au sommet de la majesté royale, que j’ai baptisée, que j’ai tenue sur les fonts baptismaux, marquée des sept dons du Saint-Esprit, et sacrée de l’onction des rois, par le saint chrême du même Saint-Esprit, j’ai ordonné ce qui suit :


Malédictions

 

Si un jour cette famille, tant de fois consacrée au Seigneur par mes bénédictions, rendant le mal pour le bien, usurpe, ravage ou détruit les églises de Dieu et s’en déclare l’ennemie ou la persécutrice, que les évêques du diocèse de Reims soient convoqués et lui fassent d’abord des remontrances, qu’ensuite l’Église de Reims, s’adjoignant sa sœur l’Église de Trèves, aille une deuxième fois trouver le roi. La troisième fois, que trois ou quatre archevêques des Gaules seulement soient convoqués et fassent des remontrances au prince, quel qu’il soit en sorte que la longanimité de la tendresse paternelle diffère jusqu’au septième avertissement, si les premiers n’obtiennent aucun succès . 

Enfin, si au mépris de toutes les remontrances, il ne dépose pas cet esprit d’obstination incorrigible, s’il refuse de se soumettre à Dieu et de participer aux bénédictions de l’Église, que tous prononcent contre lui la sentence de séparation du corps de l’Église, par la formule que l’on sait avoir été chantée il y a longtemps par le prophète-roi David, sous l’inspiration de ce même Saint-Esprit qui est dans les évêques : « Parce qu’il a persécuté l’indigent, le pauvre, l’homme au coeur contrit, parce qu’il ne s’est point souvenu de la miséricorde et qu’il a aimé la malédiction, celle-ci lui arrivera ; il n’a point voulu de la bénédiction, elle s’éloignera » (Ps 108, 16-1Col). Et tout ce que l’Église a l’habitude de chanter de Judas le traître et des mauvais évêques, que toutes les églises le chantent de lui .

Parce que le Seigneur a dit : « Tout ce que vous avez fait au plus petit des miens, c’est à moi que vous l’avez fait et tout ce que vous ne leur avez pas fait, c’est à moi que vous ne l’avez pas fait » (Mt 25, 40 & 45), ainsi ce qui est vrai pour la tête l’est aussi pour les membres. Il ne faut changer qu’un seul mot par interposition : « Que ses jours soient abrégés et qu’un autre reçoive l’autorité royale 2 ! » (Ps 108, 8.)

Si mes successeurs les archevêques de Reims négligent d’accomplir ce que j’ai ordonné, qu’ils soient frappés de malédiction et qu’ils subissent les peines portées contre les princes : « Que leurs jours soient abrégés et qu’un autre reçoive leur évêché . »


Bénédictions


Mais si Notre Seigneur Jésus-Christ daigne écouter les prières que je répands tous les jours en présence de la majesté divine, spécialement pour la persévérance de cette famille royale, suivant mes recommandations, dans le bon gouvernement de son royaume et le respect de la hiérarchie de la sainte Église de Dieu, qu’aux bénédictions que le Saint-Esprit a versées par ma main pécheresse sur la tête de son chef, le même Esprit-Saint joigne d’autres bénédictions plus abondantes et que de lui sortent des rois et des empereurs qui, pour le présent et pour l’avenir, selon la volonté du Seigneur, confirmés dans la vérité et la justice pour l’extension de la sainte Église, puissent conserver le royaume et en reculer chaque jour les limites ; puissent-ils être élevés aussi sur le trône dans la maison de David, c’est-à-dire dans la Jérusalem céleste, pour y régner éternellement avec le Seigneur. Ainsi soit-il . 

Fait à Reims même jour que dessus et sous le consul susnommé, en présence et avec la participation des soussignés :

+ Moi, Rémi, évêque, j’ai relu, signé, scellé et fermé ce testament, avec la grâce de Dieu, au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit.

 

CHARLEMAGNE

 

 

Charlemagne, fils de Pépin le Bref et de Bertade appelée dans la légende Berthe aux grands pieds, naquit le 2 avril 742, partagea, en 768 avec son frère Carloman l'héritage de Pépin le Bref, demeura, en 771, à la mort de Carloman, seul maître du Royaume des Francs et fut couronné empereur d'occident à Rome par le pape Léon III en l'an 800, le jour de la fête de Noël.

Charlemagne s'efforça de faire revivre la civilisation mourante ou plutôt déjà morte ; il refoula les Arabes, dompta les Germains encore presque sauvages, détruisit l'empire des Avares et imposa le christianisme à ces peuples païens ; évangélisation violente contre laquelle se prononça, pour l'honneur de l'humanité, l'illustre Alcuin, abbé de Saint-Martin de Tours. Charlemagne réforma l'Église, détruisit les abus qui l'avaient envahie et s'efforça dé combattre l'ignorance grossière des clercs. Tout en restaurant l'étude du grec et du latin, il s'occupait avec amour de sa langue maternelle, en commençait même une grammaire et composant un recueil de vieux chants nationaux.

L'empereur entendait volontiers pendant ses repas un récit ou une lecture et c'étaient les histoires et les hauts faits des temps passés qu'on lui lisait d'ordinaire. Il aimait aussi beaucoup les ouvrages de saint Augustin et particulièrement la Cité de Dieu.

Son activité était incessante : elle avait quelque chose de fiévreux ; il se relevait pour travailler jusqu'à quatre ou cinq fois dans la même nuit ; il conférait avec ses amis et ses conseillers tout en se chaussant, en s'habillant et il lui arriva de rendre des sentences et de prononcer des jugements en faisant sa toilette comme s'il eût siégé sur son tribunal. Prodigieux efforts d'un homme qui s'épuise à une œuvre impossible et qui lutte contre toutes les forces de son temps ! A cette. époque, le morcellement de l'Europe occidentale était commencé : les peuples se séparaient les uns des autres et brisaient leurs entraves. C'était un immense travail d'enfantement d’où devait sortir les nations modernes. Pour fonder un empire solide, il eût fallu à Charlemagne la force d'arrêter ce mouvement du monde ; il ne l'arrêta pas, mais il l'entrava un instant et rendit pour quelques années l'unité à l'Occident chrétien. Quand il mourut le 28 janvier 814, sa domination s'étendait de Pampelune à Raguse, de l'Eyder jusqu'à la terre d'Otrante et de la Theiss jusqu'à l'océan Atlantique.

Les peuples ont mesuré longtemps la grandeur d'un homme à l'étendue de sa puissance. Charlemagne ayant été démesurément grand dans l'espace fut aux yeux des nations le grand homme par excellence. L'imagination populaire s'empara de cette forte figure historique et Charlemagne inspira une vaste poésie nationale, une légende gigantesque qui a traversé mille ans pour arriver jusqu'à nous.

 

Discours prononcé par Charlemagne dans un champ-de-Mars

 

Charlemagne réunissait fréquemment de nombreuses assemblées où délibéraient les grands de l'empire, clercs et laïques. L'exhortation pieuse que nous publions aurait été prononcée, d'après M. Pertz, au mois de mars de l'an 802, dans l'une de ces assemblées réunies à Aix-la-Chapelle. L'empereur paraît y congédier ses leudes. Ce discours qui nous donne une idée de l'éloquence de Charlemagne, si vantée par Éginhard, s'appellerait donc, en style moderne, un discours de clôture après la session législative. Il est adressé à l'ensemble de la nation, aux évêques, aux chanoines, aux guerriers, aux femmes et aux enfants.

Il résulte de ce texte que les femmes pouvaient assister aux grands plaids nationaux et que les guerriers francs s'y rendirent quelquefois accompagnés de leur famille tout entière. Ce n’est pas, du reste, le seul document de ces temps-là qui nous montre les femmes se mêlant aux affaires publiques : on vit au IXè siècle les religieuses elles-mêmes s'occuper de politique. Un concile tenu à Nantes le leur défendit ainsi qu'aux veuves. 

Une partie de ce curieux discours nous est parvenue dans un manuscrit du Xè siècle : il est transcrit intégralement dans un manuscrit du XIè. Nous reproduisons, à l'exemple de M. Pertz, cette transcription barbare, afin de donner un spécimen de la science des copistes du XIè et du XIIè siècle. 


Discours de seigneur Charles, Empereur


Écoutez, frères bien-aimés ! Nous avons été envoyés ici pour votre salut afin de vous exhorter à suivre exactement la loi de Dieu et à vous convertir dans la justice et la miséricorde à l'obéissance aux lois de ce monde.

Je vous exhorte d'abord à croire en un seul Dieu tout-puissant, Père, Fils, et Saint-Esprit Dieu unique et véritable, Trinité parfaite, Unité véritable, Dieu créateur des choses visibles et des choses invisibles, dans lequel est notre salut et qui est l'auteur de tous biens. Croyez au Fils de Dieu fait homme pour le salut du monde, né de la Vierge Marie par l'opération du Saint-Esprit. Croyez que pour notre salut Il a souffert la mort ; que le troisième jour, Il est ressuscité des morts ; qu'Il est monté au ciel, où Il est assis à la droite de Dieu. Croyez qu'Il viendra pour juger les vivants et les morts et qu'Il rendra alors à chacun suivant ses œuvres.

Croyez en une seule Église, c'est-à-dire en la société des bons par tout l'univers et sachez que ceux-là seuls pourront être sauvés et qu'à ceux-là seulement le royaume de Dieu appartient, qui persévèrent jusqu'à la fin dans la foi, la communion et la charité de cette Église. Ceux qui à cause de leurs péchés sont exclus de cette Église et ne reviennent pas vers elle par la pénitence, ne peuvent faire en ce siècle aucune action, qui soit acceptée de Dieu. Soyez persuadés que vous avez reçu au baptême l'absolution de tous vos péchés. Espérez en la miséricorde de Dieu, qui nous remet nos péchés de chaque jour par la confession et la pénitence. Croyez à la résurrection de tous les morts, à la vie éternelle, au supplice éternel des impies. 

Telle est la foi qui vous sauvera, si vous la gardez fidèlement et si vous y joignez les bonnes œuvres car la foi sans les œuvres est une foi morte et les œuvres sans la foi, même quand elles sont bonnes, ne peuvent plaire à Dieu. Aimez donc d'abord le Seigneur tout-puissant de tout votre cœur et de toutes vos forces ; tout ce que vous croyez devoir Lui plaire, accomplissez-le toujours, selon votre pouvoir, avec le secours de Sa grâce, mais évitez tout ce qui Lui déplaît, car il ment celui qui prétend aimer Dieu et ne garde pas Ses commandements. 

Aimez votre prochain comme vous-mêmes et faites l'aumône aux pauvres selon vos ressources. Recevez les voyageurs dans vos maisons, visitez les pauvres et soyez charitables pour les prisonniers autant que vous le pourrez, ne faites de tort à personne et ne vous accordez point avec ceux qui font tort à autrui car il n'est pas mal seulement de nuire au prochain, il est mal encore de s'entendre avec ceux qui lui nuisent. Pardonnez-vous mutuellement vos offenses si vous voulez que Dieu vous pardonne vos péchés. 

Rachetez les captifs, secourez ceux qui sont injustement opprimés, défendez les veuves et les orphelins : prononcez des jugements conformes à l'équité, ne favorisez aucune injustice, ne vous abandonnez point à de longues colères, évitez l'ivresse et les festins inutiles. 

Soyez humbles et bons les uns envers les autres, soyez fidèles à vos seigneurs, ne commettez ni vols, ni parjures et n'ayez aucune entente avec ceux qui en commettent. Les haines, la jalousie et la violence nous éloignent du royaume de Dieu. Réconciliez-vous au plus tôt les uns avec les autres car s'il est dans la nature de l'homme de pécher, s'amender est angélique, mais persévérer dans le péché est diabolique. 

Défendez l'Église de Dieu et aidez-la afin que les prêtres de Dieu puissent faire prier pour vous. Souvenez-vous de ce que vous avez promis à Dieu au baptême : vous avez renoncé au démon et à ses œuvres ; ne retournez point vers lui, ne retournez point aux œuvres auxquelles vous avez renoncé mais demeurez dans la volonté de Dieu comme vous l'avez promis et aimez Celui qui vous a créés et par lequel vous avez eu tous les biens. Que chacun serve Dieu fidèlement dans la place où il se trouve. 

Que les femmes soient soumises à leurs maris en toute bonté et pudeur ; qu'elles se gardent d'actes déshonnêtes, qu'elles ne commettent point d'empoisonnements et ne se livrent point à la cupidité car ceux qui commettent ces actes sont en révolte contre Dieu. Qu'elles élèvent leurs fils dans la crainte de Dieu et qu'elles fassent l'aumône suivant leur fortune, d'un cœur bon et joyeux. 

Que les maris aiment leurs femmes et ne leur disent point de paroles déshonnêtes, qu'ils dirigent leurs maisons avec bonté et qu'ils se réunissent plus souvent à l'église. Qu'ils rendent aux hommes ce qu'ils leur doivent sans murmure et à Dieu ce qui est à Dieu, de bonne volonté. 

Que les fils aiment leurs parents et les honorent. Qu'ils ne leur désobéissent point et qu'ils se gardent du vol, de l'homicide et de la fornication ; qu'ils prennent, quand ils auront atteint l'âge du mariage, une femme légitime, à moins qu'ils ne préfèrent entrer au service de Dieu. 

Que les clercs et les chanoines obéissent diligemment aux commandements de leurs évêques ; qu'ils gardent leur résidence et n'aillent point d'un lieu à un autre. Qu'ils ne se mêlent point aux affaires du siècle. Qu'ils conservent la chasteté : la lecture des saintes Écritures doit les rappeler fréquemment au service de Dieu et de l'Église.

Que les moines soient fidèles aux promesses qu'ils ont faites à Dieu ; qu'ils ne se permettent rien de contraire à la volonté de leur abbé ; qu'ils ne se procurent aucun gain honteux. Qu'ils sachent par cœur leur règle et la suivent régulièrement, se rappelant que, pour un grand nombre, il eût mieux valu ne pas prononcer de vœu que de ne pas accomplir le vœu prononcé. 

Que les ducs, les comtes et les juges soient justes envers le peuple, miséricordieux envers les pauvres, qu'ils ne vendent point la justice pour de l'argent et qu'aucune haine particulière ne leur fasse condamner les innocents. Qu'ils aient toujours dans le cœur ces paroles de l'Apôtre : Il nous faudra comparaître tous devant le tribunal du Christ, où chacun sera jugé selon ses œuvres, bonnes ou mauvaises. Ce que le Seigneur a exprimé par ces paroles : Comme vous aurez jugé, ainsi vous serez jugé vous-même, c'est-à-dire, soyez miséricordieux afin que Dieu vous fasse miséricorde. 

Il n'y a rien de secret qui ne doive alors être connu, rien de caché qui ne doive être découvert. Au jour du jugement nous rendrons compte à Dieu de toute parole inutile. Efforçons-nous donc, avec le secours de Dieu, de Lui plaire dans toutes nos actions, afin qu'après la vie présente nous méritions de nous réjouir dans l'éternité avec les saints du Seigneur.

Cette vie est courte et l'heure de la mort est incertaine ; qu'avons-nous autre chose à faire, sinon à nous tenir toujours prêts ? N'oublions pas combien il est terrible de tomber entre les mains de Dieu. Par la confession, la pénitence et l'aumône nous rendons le Seigneur miséricordieux et clément ; s'Il nous voit revenir vers Lui de tout cœur, Il aura aussitôt pitié de nous et nous fera miséricorde. 

Seigneur, accordez nous les prospérités de cette vie et l'éternité de la vie future avec vos saints.

Que Dieu vous garde, frères bien-aimés ! 


Testament de Charlemagne


Il fit, l'an 811, un Testament pour disposer des trésors de son épargne en faveur des pauvres et des églises. Pour cela, il fit faire l'inventaire de l'or et de l'argent, des pierreries, et des autres ornements royaux et bijoux qui étaient dans son palais et il en forma trois lots. 

Il joignit ensemble les deux premiers lots, et en fit vingt et une parts, qu'on scella de son sceau, pour être distribuées en aumônes, après sa mort, par ses héritiers, à vingt et une Églises métropolitaines.

Il ordonna que chaque métropolitain, ayant reçu la part qui lui était destinée, en gardât le tiers pour son Eglise, et partagent les autres deux tiers entre ses suffragants. 

Il nomma ainsi ces vingt et une métropoles : Rome et Ravenne, qui, sans faire proprement partie de ses États, étaient sous la protection du défenseur armé de l'Église romaine ; Milan, Frioul, Grade, Cologne, Mayence, Salzbourg, Trèves, Sens, Besançon, Lyon, Rouen, Reims, Arles, Vienne, Tarentaise, Embrun, Bordeaux, Tours et Bourges. 

On ne voit dans cette énumération ni Eause, ni Aix, ni Narbonne. Eause avait été ruinée par les musulmans et la dignité de métropole n'avait pas, sans doute, encore été transférée à Auch. Quelques-uns croient qu'on contestait encore à Aix le droit de métropole. Mais Charlemagne pouvait avoir quelque raison de l'omettre, aussi bien que Narbonne, qui était certainement une des plus anciennes Églises métropolitaines.Peut-être avait-il fait quelque donation particulière à ces Églises. 

A l'égard du troisième lot, il voulut qu'on s'en servît pour les dépenses ordinaires de sa maison, et qu'après sa mort ou son abdication, on fit de ce qui en resterait quatre parts, dont la première serait ajoutée aux vingt et une parts destinées aux Églises, la seconde partagée entre ses enfants, la troisième distribuée aux pauvres, la quatrième réservée aux esclaves de l'un et de l'autre sexe qui servaient le palais. 

Il ordonna d'ajouter à la part des pauvres tous les vases de cuivre et de fer, les armes, les habits et les meubles de son palais. Il ne voulut pas qu'on touchât à sa chapelle, c'est-à-dire aux ornements et aux vases qui servaient à l'autel ; mais il prescrivit de vendre au profit des pauvres les livres de sa bibliothèque. 

Charlemagne avait dans son trésor trois grandes tables d'argent et une d'or. Il donna à l'église de Saint-Pierre celle qui était carrée, et sur laquelle étaient gravés le plan et la description de Constantinople. Il légua à l’église de Ravenne celle qui était ronde, où étaient gravés le plan et la description de Rome. Une troisième table d'argent contenait en trois orbes la description de tout le monde : il la fit réserver, avec celle qui était d'or, pour grossir la part des pauvres et celle de ses héritiers.

Le Testament de Charlemagne est signé de plusieurs archevêques, évêques, abbés, et de quelques comtes. 

Les archevêques sont Hildebode de Cologne, Riculfe de Mayence, Arnon de Salzbourg, Vulfaire de Reims, Bernoïn de Besançon, Leidrade de Lyon, et Jean d'Arles.

Les évêques sont Théodulfe d'Orléans, Jessé d'Amiens, Heiton de Bâle et Valsgaud de Liége.

Les abbés sont Fridugise de Saint-Martin de Tours, disciple et successeur d'Alcuin, Adalongue de Lauresheim, Engilbert de Centule et Irminon de Saint-Vincent, c'est-à-dire de Saint-Germain des Prés.

Les plus connus des comtes qui souscrivirent cet Acte sont Vala, frère de saint Adalard, et Gérold, de la reine Hildegarde.


TESTAMENT DE SAINT LOUIS

 



Dès son arrivée à Tunis, devant le château de Carthage, nous dit Joinville, le saint roi, pris d'un flux de ventre, fut obligé de se coucher. Comme il sentait qu'il allait trépasser, il fit appeler son fils aîné, Philippe et lui recommanda d'observer les «enseignements» qu'il lui remit et qui étaient écrits de sa main : 

Beau fils, la première chose que je t'enseigne, est que tu mettes ton cœur en l'amour de Dieu ; car sans cela nul ne peut être sauvé.

Si Dieu t'envoie adversité, reçois-la en patience, et rends-en grâce à Notre-Seigneur, et pense que tu l'as méritée, et qu'Il te tournera tout à profit. S'Il te donne prospérité, remercie-Le humblement... Aie le cœur doux et pitoyable aux pauvres, aux chétifs et aux malheureux ; aide-les, réconforte-les. 

Maintiens les bonnes coutumes de ton royaume et abats les mauvaises. N'exige pas trop de ton peuple ; à moins de grande nécessité, ne le charge pas d'impôts ni de taille. Entoure-toi de personnes sages et loyales, qui ne soient pas pleines de convoitises, et parle souvent avec elles ; fuis la compagnie des méchants.

A rendre justice, à faire droit à tes sujets, sois loyal et raide, sans tourner à dextre ni à senestre, mais en allant toujours tout droit, et soutiens la querelle du pauvre jusqu'à ce que la vérité soit déclarée. Et si quelqu'un croit avoir à se plaindre de toi, fais enquérir du fait jusqu'à ce que tu en saches la vérité ; tes conseillers en jugeront ainsi plus librement, pour toi ou contre toi.

Détiens-tu quelque chose qui appartienne à autrui, ou par toi ou par tes devanciers ? Si c'est chose certaine, rends-la sans attendre. Si c'est chose douteuse, fais enquérir par des gens sages, vite et diligemment.

Que tes gens et tes sujets vivent, sous toi, en paix et en droiture. Garde les bonnes villes et les communes de ton royaume dans l'état et la franchise où tes devanciers les ont gardées ; s'il y a quelque chose à amender, amende et redresse-le. Tiens-les en faveur et en amour ; en voyant la force et la richesse des grosses villes, tes sujets et les étrangers craindront d'en venir aux prises avec toi, spécialement tes pairs et tes barons... 

A ton père et à ta mère porte honneur et révérence, et garde leurs commandements. Les bénéfices de la sainte Eglise, donne-les à de bonnes personnes et de vie nette. Garde-toi de partir en guerre sans mûre réflexion. Si guerres et querelles éclatent entre tes sujets, apaise-les le plus tôt que tu pourras.

Aie soin d'avoir de bons prévôts et de bons baillis ; renseigne-toi souvent à leur sujet et au sujet des gens de ta maison, pour savoir comment ils se comportent, et s'il y a en eux excès de convoitise, de fausseté ou de tromperie. Veille aussi à ce que les dépenses de ta maison soient raisonnables.

Enfin, très doux fils, fais chanter des messes pour mon âme et fais dire des oraisons par tout ton royaume ; et donne-moi part spéciale et plénière dans tout le bien que tu feras...


Dernières paroles de Saint Louis


Sur le point de mourir, songeant avec tristesse aux croisés qui l'avaient suivi sur la terre d'Afrique et qui, frappés, comme lui, de la peste, risquaient d'être massacrés ou faits prisonniers par les infidèles, le benoît roi tendit ses mains jointes au ciel et dit :     

Beau sire Dieu, aie pitié de ce peuple qui demeure et conduis-le en son pays ; qu'il ne tombe point aux mains de l'ennemi et ne soit point contraint de renier Ton saint Nom.

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